HEALY EN SOLITAIRE, LA NORMANDIE LUI RÉPOND

 VAN DER POEL, JAUNE D’UNE SECONDE

Il a suffi d’un geste, d’une attaque sèche, de ce coup de rein à 42 kilomètres de l’arrivée pour faire basculer l’étape. Ce jeudi 10 juillet, sur les routes bosselées du bocage normand, Ben Healy n’a pas seulement gagné la 6e étape du Tour de France 2025. Il a signé un acte d’autorité, une démonstration à l’ancienne, comme on n’en voit plus qu’à la télévision quand les archives nous ramènent aux heures glorieuses des Sean Kelly ou Stephen Roche. En s’imposant en solitaire à Vire Normandie, l’Irlandais a perpétué une tradition familiale et nationale, inscrivant son nom dans une lignée de légendes vert-blanc-orange. Mais cette victoire va au-delà de l’anecdote : elle dit aussi quelque chose d’un Tour qui s’ouvre aux audacieux, à ceux qui tentent, à ceux qui osent.

Cette victoire éclaire d’un jour nouveau les enjeux du Tour 2025.

Sur cette étape dite de "transition", entre les plages du Débarquement et les terres agricoles du Calvados, tout laissait penser à une journée contrôlée. 179 coureurs au départ, un sprint intermédiaire très tôt dans le parcours, des équipes comme Intermarché-Wanty ou Lidl-Trek soucieuses de ne rien laisser filer. Et pourtant, le peloton s’est vite échauffé. Une échappée, puis deux, puis dix tentatives... Avant que le bon coup ne prenne enfin. Huit hommes, dont Van der Poel, Yates, Tejada, et surtout Healy, parviennent à se détacher après 70 kilomètres de lutte. Les jambes brûlent, les visages se ferment. Mais l’Irlandais, lui, a déjà un plan.

À l’arrière, les UAE Emirates XRG de Pogacar calculent. Laisser Van der Poel reprendre le maillot jaune n’est pas une mauvaise affaire. Pogacar n’a pas besoin d’assumer dès maintenant. Résultat : l’échappée bénéficie d’une forme de tolérance, une "fenêtre politique" comme disent les anciens, où tout peut se jouer. Et Ben Healy ne rate pas sa chance. À 42 kilomètres du but, il attaque, une seule fois. Personne ne le reverra. Derrière, Simmons et Storer s’échinent pour revenir. En vain. Sur la ligne, Healy lève les bras. Sans théâtralité, mais avec la certitude du travail accompli. À l’arrivée, le maillot jaune change d’épaules pour une seconde : Van der Poel en profite, Pogacar se méfie.

Cette victoire éclaire d’un jour nouveau les enjeux du Tour 2025. Elle interroge la stratégie des grandes équipes, souvent paralysées par l’attente, mais aussi leur volonté de laisser vivre la course. Peut-on encore gagner un Tour sans prendre de risques ? La performance d’Healy prouve que oui, une échappée peut encore aller au bout. Mieux : elle peut écrire une page d’histoire. Elle pose aussi la question de l’évolution du cyclisme moderne, souvent dominé par les algorithmes, les capteurs de puissance, les oreillettes. Ici, c’est l’instinct qui a parlé. Et la Normandie, fidèle à son relief, a offert le théâtre idéal. À ce jeu-là, Healy a montré qu’il savait lire la carte mieux que les autres.

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Ludovic BEUZERON, Journaliste indépendant 
pour C11 .MEDIA et La Voix des Citoyens 
Membre actif de la #fnjmi 🇫🇷

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Crédit photographique : DR, Image :https://www.letour.fr/fr, Buzee Prod 2025

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