UNE JOURNÉE POUR DIRE MERCI... MAIS À QUI ET POURQUOI ?

FÊTE DES MÈRES : UNE CÉLÉBRATION QUI CACHE UNE HISTOIRE PLUS COMPLEXE QU’IL N’Y PARAÎT

Chaque année, au printemps, des millions de fleurs sont offertes. Les vitrines se parent de cœurs, les enfants récitent des poèmes, les commerçants multiplient les promotions. Pourtant, derrière cette douce tradition qu’est la Fête des Mères se cache une histoire bien plus politique, parfois controversée, souvent méconnue. Car cette journée que l’on croit universelle est en réalité un produit culturel, ancré dans des contextes très différents selon les pays. Et si l’on gratte le vernis, on découvre des origines inattendues, parfois même teintées d’idéologie.

Bonne fête maman dit le petit Julien à Sophie sa mère.

En France, la Fête des Mères ne naît ni dans un salon bourgeois, ni dans une école républicaine, mais dans les rangs conservateurs d’un pays en guerre. Officiellement instaurée en 1950 par une loi du gouvernement Pleven, la célébration est en fait héritée d’initiatives locales apparues dès 1906. La ville d’Artas, en Isère, revendique d’ailleurs la première cérémonie en l’honneur des mères de familles nombreuses. Mais c’est sous le régime de Vichy, en 1941, que la fête prend une tournure nationale : Pétain y voit un moyen d’exalter les valeurs traditionnelles, d'encourager la natalité et de promouvoir la femme au foyer, mère nourricière de la nation. Ce passé pèse encore, en filigrane, sur les célébrations modernes, malgré les tentatives de réappropriation plus neutres ou commerciales depuis les Trente Glorieuses.

Dans d'autres pays, la Fête des Mères suit une toute autre trajectoire. Aux États-Unis, elle naît d’un combat féministe et pacifiste. En 1872, Julia Ward Howe appelle à une « Journée des Mères pour la paix », opposée à la guerre et favorable à l’engagement civique des femmes. Mais c’est Anna Jarvis qui, en 1908, organise la première vraie célébration en mémoire de sa mère, militante sociale. Son succès est tel que la fête devient officielle en 1914, proclamée par le président Wilson. Ironie du sort : quelques années plus tard, Jarvis s’en désolidarise, dénonçant la récupération commerciale de ce qu’elle voulait profondément intime et moral.

À l’échelle mondiale, la diversité est frappante. Dans les pays arabes, la fête est souvent célébrée le 21 mars, en lien avec l’équinoxe de printemps. En Thaïlande, elle a lieu le 12 août, jour de l’anniversaire de la reine mère Sirikit. Au Mexique, c’est le 10 mai, avec des concerts et des processions religieuses. Ce qui change : la date, la portée, le ton. Ce qui reste : une volonté commune d’honorer celles qui donnent la vie, soutiennent les familles, tiennent les sociétés debout — souvent dans l’ombre.

Mais alors, que célèbre-t-on vraiment ? Une figure maternelle idéalisée ? Un rôle social figé ? Un prétexte à consommer ? Derrière la tendresse sincère des gestes, il faut questionner la symbolique. Dans un monde où les formes de parentalité évoluent, où les femmes revendiquent des places plurielles dans la sphère publique comme privée, la Fête des Mères reste parfois prisonnière d’un récit réducteur. On y célèbre l’amour, mais on y renforce aussi, inconsciemment, des modèles anciens.

Il ne s’agit pas de renier cette journée, mais d’en élargir le sens. D’en faire, peut-être, une fête des liens, de la reconnaissance, du soin apporté — peu importe qui le donne. Car dans le silence des aidantes, dans la fatigue des mères solos, dans les luttes pour la parentalité LGBT+, il y a là aussi matière à célébrer. La Fête des Mères a une histoire. Elle a surtout un avenir, si elle accepte d’évoluer avec son temps. Mais ça, c'est une autre histoire !

__________________________

Ludovic BEUZERON, Journaliste indépendant
pour C11 .MEDIA et La Voix des Citoyens
Membre actif de la #fnjmi 🇫🇷

Rédaction : Press’K - Tous droits réservés
Crédit photographique : DR, Buzee Prod 2025

📱Téléchargez notre application  C11 .MEDIA depuis votre navigateur.
Dans l’Aude :  « C’est le media qui vous donne la parole »

📌 Suivrez-nous gratuitement 24/7 sur www.lefilactu.fr

#c11media #journaliste #information  #citoyen #aude

⚠️ Pour nous soutenir, n’oubliez pas de liker et partager… Merci